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Les albums sans texte: c’est quoi et comment les utiliser avec nos enfants?
Développer des stratégies de lecture efficaces sans lire avec les albums sans texte
Pourquoi utiliser les albums sans texte avec nos enfants ?
Lire est une entreprise vaste et complexe qui demande le recours à diverses stratégies à utiliser simultanément.
Ce serait enfoncer une porte ouverte que de rappeler l’importance de la lecture. Pourtant, pour de nombreux enfants, cela semble inutile, démotivant ou peut-être pire : inaccessible.
Est-ce le cas de votre enfant? Et comment changer cette perspective?
Notre compréhension de la lecture est souvent limitée au fait de décoder des mots. C’est pourtant une multitude de processus qu’il est nécessaire de mettre en branle pour accéder au sens d’un texte.
Et si un enfant pouvait développer sa compétence à lire… sans mots? Développer son autonomie dans la création de sens, mais sans l’obstacle que peut représenter le code écrit, du moins provisoirement?
Est-ce possible? La réponse est oui! Comment? Je vous en parle plus loin dans cet article.
Premiers pas dans l’univers de la lecture : maîtriser les habiletés clés
Mais d’abord… Bien avant de savoir lire des mots, un lecteur compétent pourra mobiliser plusieurs habiletés qui le soutiendront dans sa quête de sens. Des habiletés qui interviendront avant, pendant et après la lecture à proprement parler.
En voici quelques-unes que je vous présente. Elles ne sont pas nécessairement ordonnées, peuvent se chevaucher, s’utiliser de façon simultanée. L’important est que l’enfant soit conscient de leur existence, sache comment s’en servir et en saisisse l’importance.
Tout part d’une intention
Dans un premier temps, l’enfant s’inspirera d’une intention de lecture. C’est cette intention qui le guidera dans sa compréhension, l’aidera à aborder le texte de façon efficace. Ainsi, je ne lirai pas un texte informatif de la même façon si je veux apprendre de nouvelles informations sur le mode de vie des loups pour satisfaire ma curiosité que si je dois répondre à des questions ou produire un résumé sur le sujet.
Dans mes moments de loisir, je ne choisirai pas le même type de lecture si mon objectif est de me renseigner que si je désire me transporter dans une histoire romancée.
💡 Cela semble évident, mais il est important de soutenir la prise de conscience de ce processus chez votre enfant, particulièrement s’il est en difficulté ou éprouve des enjeux sur le plan de ses fonctions exécutives. Une façon toute simple de le guider est de lui poser quelques questions :
«Pourquoi lis-tu ce texte?»
«Quel est le type de texte que tu t’apprêtes à lire et que va-t-on chercher dans ce type de texte?»
Vous pouvez consulter ces liens pour aller un peu plus loin:
📄 Déterminer l’intention de lecture
📽️Déterminer mon intention de lecture — secondaire
L’importance du survol avant la lecture
On est souvent pressé de se mettre à lire un texte, particulièrement si on a une tâche à faire en lien avec celui-ci et que nous anticipons des difficultés. «Plus vite, je commence, plus vite je termine», peut se dire l’enfant un peu effrayé.
Ce n’est pourtant pas nécessairement le cas.
Une étape préliminaire à la lecture proprement dite consiste à observer le texte et en distinguer les indices. Ça prend un peu de notre temps, mais c’est un bon investissement.
J’utilise souvent l’image d’un hélicoptère dans lequel je prends de la hauteur. Du haut des airs, je pourrai analyser le terrain, ici le titre, les intertitres, les images et autres indices visuels, la longueur du texte aussi.
Dans le cas d’un livre narratif, je pourrai observer la 1re de couverture, le titre et l’image qui l’illustre, la table des matières s’il y en a une, le résumé le cas échéant.
Ces indices m’aideront à anticiper ce qui sera lu. Je suis donc déjà en processus de création de sens.
💡 Pour guider votre enfant, vous pouvez simplement observer avec lui un texte qu’il s’apprête à lire et lui demander quel en est le titre, de quoi cela parlera selon lui, quels indices il utilise pour le savoir, à quel endroit selon lui on lui parlera de telle ou telle chose.
📄 Pour aller un peu plus loin.
Cultiver l’art des prédictions en lecture
Le lecteur habile fera aussi, avant et tout au long de sa lecture, des prédictions sur ce qu’il lira. Il tentera d’anticiper le contenu du texte. Il sera ensuite en mesure d’évaluer la justesse de ses prédictions et de les réajuster au besoin s’il s’aperçoit qu’il s’est trompé. Souvent, plusieurs prédictions surgiront naturellement au moment du survol du texte.
Il faut garder à l’esprit que faire une hypothèse erronée ne constitue pas une erreur. C’est un processus normal de création de sens.
L’important est de pouvoir s’en apercevoir et reconstruire sa perspective si c’est nécessaire afin de l’ajuster à ce qui est lu. Mais ce n’est pas si simple. En plus d’être apte à comprendre ce qui est lu, cela demande une souplesse cognitive qui n’est pas toujours présente chez le jeune lecteur, particulièrement s’il juge la lecture difficile.
💡 Encore une fois, procéder par questionnement est une bonne façon de soutenir le développement de cette stratégie chez votre enfant. «Que penses-tu que cette histoire raconte?» ou «Crois-tu que nous apprendrons combien de bébés peuvent avoir les éléphantes dans une seule portée?»
Le plus grand défi est de s’arrêter judicieusement pendant la lecture pour se demander : «Finalement, est-ce que notre hypothèse était vraie?», puis se réajuster au besoin.
Exploiter les connaissances antérieures pour enrichir la lecture
Lorsqu’il survole la structure d’un texte, fait des prédictions, se centre sur une intention, le lecteur sollicite généralement ce qu’il connait déjà du sujet abordé. Toutefois, il le fait souvent de façon quasi instinctive. On peut alors le guider pour qu’il en prenne pleinement conscience. Les enfants ne réalisent souvent pas qu’ils savent et ont expérimenté plein de choses. Leur confiance est déjà fréquemment très ébranlée et ils ne voient pas tout ce dont ils disposent et qui est à leur portée pour les aider.
💡 Le simple fait de faire des liens avec une émission vue à la télé, un film regardé au cinéma, une discussion avec un ami ou un parent peut constituer un soutien important à la compréhension d’un texte. Si votre enfant affirme ne rien connaitre d’un sujet, questionnez-le sur des expériences vécues pour l’aider à accéder à ses connaissances.
📽️Ressource vidéo pour aller plus loin.
Dépasser le décodage de mots : vers une compréhension plus profonde
Si vous avez remarqué, depuis tout à l’heure, je parle de compréhension en lecture. Pourtant, à aucun moment, je n’ai mentionné l’importance de lire des mots, de les décoder. Bien sûr, cela deviendra rapidement nécessaire et incontournable.
Cependant, il arrive que les mots constituent plutôt un obstacle qu’un soutien à la compréhension. C’est vrai pour l’enfant qui ne sait pas encore lire, mais aussi pour le lecteur qui décode, mais qui n’est pas stratégique.Un enfant qui lit pour lire n’accèdera probablement pas au sens de ce qu’il lit. Il parcourra le texte du début à la fin, en lira chaque mot, mais ne pourra rien retirer ou presque de sa lecture.
Pourquoi? Plusieurs raisons peuvent l’expliquer. Il peut être en surcharge cognitive et perdre son énergie à décoder les mots lus. C’est beaucoup plus fréquent qu’on le pense, et même chez les plus vieux.
Il se peut aussi qu’il aborde les mots sans vue d’ensemble. En traitant chaque unité de façon isolée, sans pouvoir créer les liens nécessaires entre ces unités pour «faire du sens». On pourrait dire qu’il voit l’arbre, mais pas la forêt.
Alors, comment aider le lecteur qui ne décode pas bien ou qui ne met pas en place de stratégies de lecture de façon efficace?
En lui apprenant à se détacher des mots.
Ça ressemble souvent à un saut dans le vide. Autant pour l’enfant que pour celui qui l’accompagne, parent ou intervenant.
Et là, une ressource souvent inexploitée, inutilisée, méconnue, peut apporter un soutien de taille tout en préservant le plaisir de la lecture et la relation avec le livre.
Explorer les albums sans texte : une lecture visuelle
Qu’est-ce qu’un album sans texte? Ces livres, aussi appelés albums muets, sont des œuvres littéraires à part entière. Ils présentent une première de couverture, une illustration et un titre. Ils offrent dans leurs pages une histoire bien structurée respectant le schéma narratif auquel nous sommes habitués : grosso modo une mise en situation, un problème, des péripéties et un dénouement.
Les images peuvent occuper des pages entières ou se présenter sous forme de cases, à la manière des bandes dessinées. Ils combinent parfois les deux approches.
Mais… aucun mot. Le lecteur est dès lors obligé de lire… les images. C’est la seule façon de comprendre l’histoire. Il doit mettre en branle toute sa créativité, sa capacité à interpréter, faire des liens, anticiper, retracer la trame narrative d’une histoire pour créer du sens. Tout ça, sans qu’il puisse — ou doive — se reposer sur des mots écrits.
Les attraits des albums sans texte
Le simple plaisir justifie la lecture des livres sans texte. Les images en sont souvent particulièrement riches et les histoires surprenantes.
Ce sont des livres qu’on lit nécessairement de façon active.
Fréquemment, lorsque moi-même j’aborde un tel livre, j’avance dans l’histoire, crée mes hypothèses; puis je dois revenir en arrière, car la suite me montre que quelque chose m’avait échappé. C’est là un exercice très constructif à réaliser avec nos jeunes lecteurs pour illustrer qu’un parcours de lecture n’est pas nécessairement linéaire, que la compréhension demande certains efforts et certaines remises en question.Les livres sans texte s’adressent souvent à des lecteurs de tous les âges ou presque. Il peuvent présenter plusieurs niveaux d’interprétation, ce qui fait qu’à chaque relecture, on découvre un nouvel aspect qui nous avait échappé précédemment.Certains, comme «Le hareng rouge» (de Gonzalo Moure et Alicia Varela publié chez Les 400 coups) ou «La course au gâteau» (de Thé Tjong-Khing chez Les albums Casterman) par exemple présentent en même temps plusieurs histoires quasi indépendantes qui se rejoignent à certains moments et qui nous amènent à découvrir de nouvelles perspectives chaque fois. Un peu comme un film de Claude Lelouche!
Ces livres laissent de plus beaucoup de place au lecteur. Par exemple, il arrive fréquemment, lorsque j’en fais la lecture avec mon fils, que nous ne parvenions pas à la même conclusion lui et moi. Cela donne de belles occasions de discuter et soutient la souplesse de réaliser qu’on peut ne pas être d’accord sans avoir tort ou raison.
De plus, ils impliquent nécessairement de recourir à l’inférence pour saisir le sens profond de l’histoire. Bien qu’ils soient sans mots, il faut obligatoirement «lire entre les lignes» et décoder tous les non-dits pour parvenir à créer du sens. Ironique, non?
L’importance des compétences cognitives en lecture
Dans certains contextes, on pourrait presque dire que les mots servent de béquilles au lecteur qui n’est pas stratégique. Avec le temps et l’augmentation de la complexité des textes, s’il ne développe pas de stratégies ou ne les utilise pas judicieusement, il passera à côté d’appuis importants pour le soutenir dans son processus de compréhension.
Interpréter une structure et un contenu visuel, anticiper, prédire, se réajuster sont toutes des compétences cognitives qui se développent avec le temps et l’expérience. Et elles ne se limitent pas à la lecture.
Pourtant, plusieurs élèves ne recourent pas à ces stratégies de façon efficace, dans leur quotidien tout comme en lecture.
Ils ne savent pas comment faire ou ne sont pas conscients de l’existence ou de l’utilité de ces processus.
Les albums sans texte proposent un contexte parfait pour recourir à toutes les habiletés mentionnées plus haut, incontournables pour tout lecteur, mais sans lui imposer la surcharge des mots à décoder. En lui enlevant la pression de traiter le code écrit.
Les albums sans texte viennent en quelque sorte «obliger» l’enfant ET le parent ou l’intervenant à mettre leur énergie ailleurs que sur les mots et à se concentrer sur les autres stratégies pertinentes. C’est ainsi qu’il deviendra plus compétent pour les utiliser.
Le lecteur deviendra stratégique.
Découvertes québécoises : liste d’albums sans texte à explorer
Je vous propose maintenant quelques albums sans texte créés ici, au Québec. Des œuvres qui méritent, selon moi, d’être découvertes. Si vous ne les trouvez pas en bibliothèque ou en librairie, demandez-les! Vous contribuerez à faire découvrir cette ressource qui constitue un secret trop bien gardé.
📕 «La mer» de Marianne Dubuc, publié chez les éditions Album. Cet album retrace le parcours d’un chat très intéressé par un poisson qui manifeste une grande habileté à fuir de façon originale. Une magnifique occasion d’aborder la prédiction.
📕 «Le hareng rouge» de Gonzalo Moure et Alicia Varela, publié chez Les 400 coups, déjà mentionné plus haut, où des trames de vie se croisent et s’éloignent.
📕 «L’écharpe rouge» de Anne Villeneuve, également chez Les 400 coups. Quelques mots au tout début, puis une belle aventure faite de rencontres surprenantes dans un visuel rappelant les bandes dessinées.
📕 «Les fleurs poussent aussi sur les trottoirs» de Jon Arno Lawson et Sydney Smith, publié chez Bayard Canada. Une histoire touchante où la couleur joue pratiquement le rôle d’un personnage à part entière, pensée pour les enfants un peu plus vieux et présentée à la manière d’une BD.
📕 «Les aventures d’Alphonse Lapin» de Jean-Claude Alphen, publié chez D’eux. Une superbe et audacieuse nouveauté 2023 de… 124 pages, qui propose un voyage autour du monde avec des indices visuels qui sollicitent énormément l’éveil des connaissances antérieures et nourrissent la culture générale.
Et vous, accordez-vous une place aux albums sans texte, ou le ferez-vous? Avez-vous des découvertes coups de cœur à nous proposer?
Conclusion : soutien et ressources pour la fluidité en lecture
Un enfant qui éprouve des difficultés à lire, à décoder les mots, à atteindre une vitesse de lecture acceptable a possiblement besoin d’aide. Cela lui évitera de voir l’écart se creuser entre ce qui est attendu de lui pour son niveau scolaire et sa capacité réelle à lire.
Bien sûr, le soutien d’un orthopédagogue peut alors s’avérer des plus bénéfiques. C’est notre spécialité d’accompagner les enfants dans leurs défis d’apprentissage et nous avons à cœur de les voir vivre des réussites à leur échelle qui les aideront à rebâtir leur confiance et développer leurs compétences. Vous pouvez consulter les services que nous offrons en cliquant ici.
Cependant, parfois, un simple travail régulier et bien structuré peut faire la différence. C’est pourquoi je vous propose le document «5 étapes pour développer la fluidité en lecture». À travers une approche efficace qui a fait ses preuves, vous pourrez accompagner votre enfant dans son parcours en fluidité et vivre la fierté de le voir gagner en confiance et en compétence.
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